18 janvier 2011
Réforme de la garde à vue : un texte toujours insuffisant
mis en ligne mercredi 19 janvier 2011 par jesusparis
Communiqué du SAF
L’Assemblée Nationale examine, à compter de ce jour, le projet de loi présenté par la Chancellerie et tendant à réformer la garde à vue.
Ce n’est que contraint et forcé par des décisions, condamnant notre procédure pénale actuelle, rendues par les plus hautes juridictions françaises et européenne (Cour européenne des droits de l’homme, Cour de cassation et Conseil Constitutionnel), que le gouvernement a, enfin, soumis un texte à la représentation nationale.
La commission des lois, qui a examiné le projet le 15 décembre dernier, a déjà considéré qu’il était très insuffisant et l’a modifié sur plusieurs aspects essentiels.
➢ L’audition dite libre, véritable garde à vue sans droits, qui prévoyait qu’une personne interpellée puisse être entendue par les services de police pendant une durée indéterminée, hors la présence d’un avocat, a été supprimée ;
➢ Le contrôle des mesures de garde à vue, que le gouvernement s’obstine à vouloir laisser au procureur, au mépris des décisions pourtant claires de la Cour européenne des droits de l’homme, a été transféré entre les mains d’un juge du siège indépendant.
Refusant d’accepter ces avancées importantes et nécessaires, le gouvernement a d’ores et déjà annoncé qu’il tenterait de les anéantir par voie d’amendement.
Le Syndicat des Avocats de France ne peut que déplorer que le gouvernement refuse d’accompagner une évolution si importante de la procédure pénale et s’acharne au contraire à entretenir un climat délétère au sein de l’institution judiciaire.
Le SAF rappelle que de nombreux aspects de la garde à vue française restent à réformer et appelle en conséquence le législateur à voter un texte ambitieux, notamment en :
➢ Limitant les gardes à vues aux seuls délits punis d’une peine d’emprisonnement au moins égale à trois ans ;
➢ Supprimant les régimes dérogatoires ;
➢ Permettant à l’avocat d’avoir accès au dossier, d’assister aux interrogatoires, confrontations, présentations, perquisitions et toutes mesures d’enquête concernant le gardé à vue ;
➢ Autorisant l’avocat à poser des questions (ou à les faire noter au procès-verbal en cas de refus par l’officier de police judiciaire) et à demander tout acte utile à la manifestation de la vérité.
Le SAF souligne enfin que, sans les moyens matériels appropriés et sans une refonte immédiate du statut du parquet pour le rendre indépendant, la réforme sera un échec pour les citoyens et pour la Justice, dont le gouvernement portera seul l’entière responsabilité.