LOGEMENT - Tout le monde a été embarqué...
En un peu moins d'une heure, les CRS ont évacué l’immeuble Axa, avenue Matignon, que squattaient les militants de Jeudi noir depuis fin décembre. Selon Elise Aubry, membre du collectif, les forces de l’ordre ont donné un premier assaut à 7h20 «en pétant les vitres» et, «en moins de dix minutes» ont expulsé les neuf militants du collectif qui se trouvaient au rez-de-chaussée. Les forces de l'ordre les ont ensuite «embarqués» dans un car stationné devant l'immeuble. Tout s’est passé dans un calme relatif alors que les membres du collectif avaient annoncé qu’ils ne se laisseraient pas faire.
Ensuite les forces de l'ordre ont progressé jusqu'au toit, pour évacuer la petite dizaine de membres du collectif Jeudi noir, dont Elise Aubry et le conseiller régional Julien Bayou. Ils s'étaient barricadés jeudi soir, ayant fermé à clef toutes les portes d'accès et entreposé divers objets dans les escaliers afin de limiter la progression des forces de l'ordre. D'après notre journaliste sur place, au total, 18 membres du collectif ont été interpellés à 8h00, 19 d'après la police.
«C’est l’injustice qui prime»
Au pied de l'immeuble, des élus Europe Ecologie-Les Verts sont venus témoigner de leur soutien. Hélène Gassin, vice-présidente du conseil régional d'Ile-de-France: «C’est l’injustice qui prime, alors que des millions de gens sont mal-logés».
Un militant se faisant appeler Renard témoignait: «Les occupants ont été expulsé à cause de "troubles illicites" mais on n’a opposé qu’une résistance passive.Ce soir, vingt personnes devront de nouveau squatter chez leurs potes. Mais on continuera».
Intervention d'une heure
L'intervention, qui a duré moins d'une heure, a mobilisé un important dispositif des forces de l'ordre, soit une quinzaine de camions de CRS, en plus d'un camion des pompiers. Quant aux membres du collectif Jeudi noir interpellés, ils ont été emmenés au commissariat du 11e arrondissement de Paris à 8h20. Ils en sont ressortis une heure plus tard.
L'expulsion de l'immeuble d'Axa était attendue depuis que la justice avait ordonné mardi l’expulsion «immédiate et sans délai» de l’immeuble.
LOGEMENT - Ainsi qu'une astreinte collective de 100 euros par jour à partir de ce mardi s'ils n'évacuaient pas les lieux...
La justice a ordonné mardi matin l'«expulsion immédiate et sans délai» de l'immeuble appartenant à l'assureur Axa, avenue Matignon, proche de l'Elysée, squatté à Paris depuis fin décembre par le Collectif Jeudi Noir. Cette ordonnance d'expulsion a été prise par le tribunal d'instance du VIIIe arrondissement de Paris, saisi en référé par Axa, propriétaire de cet immeuble de bureaux vide de huit étages.
«Axa a obtenu l'expulsion de jeunes précaires au coeur de l'hiver. Mais on ne se laissera pas faire, on prépare notre défense»", a déclaré Margaux Leduc, porte-parole de Jeudi Noir. Dans l'attente du jugement, les squatteurs avaient entrepris lundi soir de barricader les entrées de l'immeuble, avait constaté l'AFP.
«C'est une décision politique et pas judiciaire», a dénoncé l'avocat du Collectif, Me Pascal Winter, à la sortie de l'audience. Sur place, les squatteurs se disaient «abattus mais pas surpris» par l'ordonnance. Le tribunal a également ordonné une astreinte collective de 100 euros par jour à compter de mardi s'ils n'évacuaient pas les lieux. Pour que l'expulsion soit effective, il faut désormais qu'Axa demande le recours de la force publique, à moins que les squatteurs ne s'en aillent d'eux-mêmes.
Jeudi noir dénonce le "blocus" par la police de son squat près de l'Elysée
(AFP) 09.01.2010
PARIS — Des militants de l'association Jeudi Noir, qui occupent depuis plusieurs jours un immeuble vacant près de l'Elysée, se sont rassemblés samedi en face du bâtiment pour dénoncer le "blocus" par la police, qui contrôle les allées et venues des occupants.
"On était une trentaine à dormir dans les lieux jeudi soir et ceux qui sont sortis hier (vendredi) matin n'ont pas pu rentrer dans le bâtiment", raconte Elise Aubry, 28 ans, qui s'est également vu refuser l'entrée. "On est complètement assiégés", s'insurge la jeune femme.
"La préfecture nous impose un blocus depuis hier (vendredi)", dénonce Julien Bayou, porte-parole de Jeudi noir et qui exige la "levée du dispositif".
"On n'est pas contre une présence policière mais ils ne doivent pas empêcher les allers et retours", a-t-il précisé, alors qu'une dizaine de policiers sont sur place.
D'après une source policière, "les policiers sont présents pour des problèmes d'ordre public et de circulation et en raison de la proximité de l'ambassade d'Israël", sise rue Rabelais.
"On a fait constater l'occupation du lieu par un huissier, on est habitant de ce lieu depuis cinq jours, c'est une atteinte à la liberté de circuler", martèle Simon Cottin-Marx, 24 ans, militant du collectif.
Le collectif Jeudi noir a réalisé un nouveau coup d'éclat cette semaine en occupant cet immeuble de bureaux - 2.500 m2 de superficie, aux façades de verre et de métal - à deux pas de l'Elysée et du ministère de l'Intérieur - pour attirer l'attention sur le sort des étudiants et jeunes actifs mal logés
Les membres de Jeudi noir avaient été expulsés fin octobre 2010 d'un immeuble place des Vosges qu'ils avaient occupé pendant un an.
Jeudi Noir ouvre un squat avec vue sur la cour de l'Elysée
Rue89 | 07/01/2011 | 05H05
Rue89 a visité le nouveau squat du collectif de mal-logés : un bâtiment de 5000 m2 qui donne sur les appartements du Président.
Après « le ministère de la Crise du logement » place de la Bourse à Paris en 2007, un ancien bâtiment de La Poste près de Bastille en 2009, l'hôtel particulier de « La Marquise » place des Vosges en 2010, le collectif des mal-logés Jeudi Noir vient discrètement d'investir un nouveau bâtiment à l'adresse plus prestigieuse encore : 22 avenue Matignon, avec vue sur la cour de l'Elysée. Rue89 a pu le visiter.
« C'est la façade noire, en face du bâtiment vitré, là-bas ». Julien Bayou, cofondateur de Jeudi Noir et récent conseiller régional d'Europe Ecologie, parle sans faire de geste. Il s'agit de ne pas se faire repérer. Ce quartier du VIIIe arrondissement est sensible : on compte quelques prestigieux voisins, parmi lesquels le ministère de l'Intérieur… et l'Elysée.
La première arrivée devant la porte d'entrée n'est pas la bonne, deux gendarmes stationnent sur le trottoir d'en face. « Faisons semblant de regarder les galeries d'art. » Cette fois, c'est bon. Entrons. Nous sommes mercredi, deux jours avant l'officialisation du squat, ce vendredi.
Au pas de course devant les immenses baies vitrées de l'entrée, on pénètre dans les entrailles de ce bâtiment reconstruit en 1976 pour l'agence de publicité J. Walter Thompson. Neuf niveaux de plus de 500 m2 chacun, 2500 m2 de surface habitable. « Dix jours qu'on est ici sans que personne ne s'en rende compte », raconte Samuel, autre membre actif de Jeudi Noir, aux côtés de Maxime, Lila, Samuel, Ophélie…
« C'est typique du bâtiment réquisitionnable »
L'endroit sonne creux, mais il est fabuleux. « Il est depuis 2006 sur une immense liste pour les squatteurs de 200 bâtiments vides à Paris, dont 10% ne sont ni gardés ni inhabitables. » Ils l'ont investi le 27 décembre. A leur demande, un huissier un peu interloqué est venu constater leur présence lundi. La demande de connexion Internet date, elle, de samedi. Il convient, pour pouvoir rester, de prouver que l'on occupe l'endroit depuis un certain moment, que le « délit de flagrance » est dépassé.
Le courrier n'est pas relevé depuis plusieurs années ; le dernier diagnostic obligatoire de désenfumage date de septembre 2006. Encore un bâtiment de bureaux inoccupé depuis trop longtemps, une résultante de la spéculation immobilière.
« On n'a pas encore eu de contact avec les propriétaires, qui sont pourtant juste en face. » En face, il y a le siège d'Axa. Plus précisément, l'édifice occupé appartient à l'Ugicomi (Union de gestion immobilière pour le commerce et l'industrie), filiale à 91% de l'assureur. Comme habituellement avec Jeudi Noir, l'humeur est à l'humour : « Le siège d'Axa n'est pas mal non plus. Mais il est occupé ! » Un humour teinté de militantisme :
« Axa, c'est l'assureur qui n'arrête pas de communiquer sur la responsabilité sociale des entreprises et il laisse des bâtiments vides. Allumés qui plus est. »
« C'est typique du bâtiment réquisitionnable », soupire autant que se réjouit l'un d'eux, en expliquant comment des bacs à douche vont prochainement remplacer des toilettes. Pour l'heure, ce n'est pas encore le grand confort : seule une quinzaine de matelas a pu être acheminée. Toujours dans le souci de ne pas se faire remarquer. Les duvets sont dépliés, la nourriture n'a pas encore de placards pour être rangée. « On est en sous-marin », s'excuse-t-il, avant de slalomer entre deux chauffages individuels.
« Sarkozy, lui, ne paye pas de loyer »
24 chambres, toutes déjà pourvues, sont prévues pour accueillir des travailleurs précaires, des mères célibataires, d'anciens squatteurs délogés de « La Marquise » en octobre, des chômeurs, des intermittents du spectacle, des étudiants…
Parmi eux, Bourhan, 48 ans, père de deux enfants. Lola, 12 ans, et Julia, 14 ans. Il a rencontré des militants de Jeudi Noir à l'occasion de petits boulots. Avec sa « femme depuis vingt ans », il occupe aujourd'hui un appartement privé de 40 m2 pour 1000 euros par mois, qu'il a de plus en plus de mal à assumer. Ce n'est pas le seul : les loyers impayés sont en hausse de 132% depuis dix ans.
Sa demande de logement social n'a toujours pas abouti. Plutôt que l'expulsion, il a choisi cette solution : 60 m2, quatre pièces. Julia aura la chambre avec vue sur l'Elysée : « Elle est plus consciente des choses.