15.10.2012
Délit de consultation de sites terroristes : le retour !
Gonflé à la LOPPSI
On pensait le délit de consultation des sites terroristes définitivement enterré. Ce texte avait été rédigé rapidement après l'affaire Merah, toutefois son architecture juridique avait été démontée par le Conseil national du numérique. Cependant, un sénateur UMP compte bien ajouter ce délit dans notre droit.
Le tout récent projet de loi sur la lutte contre le terrorisme a été enregistré au Sénat le 10 octobre dernier. On ne retrouve aucune trace du délit de consultation dans le texte du ministère de l'Intérieur présenté sous procédure d'urgence.
Les services de Manuel Valls avaient d'ailleurs démenti les informations du Monde. Nos confrères avaient un temps envisagé le retour de ce délit pour ensuite publier un démenti officiel de la place Beauvau. Cependant, chassez le diable par la porte, il revient par la fenêtre. Il faut en effet scruter du côté des amendements pour constater que ce délit est toujours bien vivant. C'est le sénateur Jean Jacques Hyest (UMP) qui s'est chargé de cet acharnement thérapeutique.
Un délit plus musclé
Il propose ainsi d'ajouter cette sanction :
« Art. . - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait de consulter de façon habituelle un service de communication au public en ligne mettant à disposition des messages, soit provoquant directement à des actes de terrorisme, soit faisant l'apologie de ces actes lorsque, à cette fin, ces messages comportent des images montrant la commission d'actes de terrorisme consistant en des atteintes volontaires à la vie. »
On peut comparer ce bout de texte avec la version signée Claude Guéant, sous le règne de Nicolas Sarkozy :
« Art. 421-2-6. - Est puni de deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende le fait de consulter de façon habituelle un service de communication au public en ligne mettant à disposition des messages, soit provoquant directement à des actes de terrorisme, soit faisant l'apologie de ces actes lorsque, à cette fin, ces messages comportent des images montrant la commission d'actes de terrorisme consistant en des atteintes volontaires à la vie. »
« Le présent article n'est pas applicable lorsque la consultation résulte de l'exercice normal d'une profession ayant pour objet d'informer le public, intervient dans le cadre de recherches scientifiques ou est réalisée afin de servir de preuve en justice. »
Le texte sénatorial est identique à la virgule près. Il fait cependant l'économie du dernier paragraphe, pourtant nécessaire pour protéger le travail des journalistes, des historiens, etc. qui peuvent être amenés à consulter régulièrement ces sites dans le cadre de leur travail.
Mais ce n'est pas tout.
Le blocage LOPPSI étendu aux sites faisant l'apologie du terrorisme
Dans un autre amendement, Jean Jacques Hyest demande des mesures proactives des intermédiaires et propose même d'étendre le périmètre du blocage des sites pédopornographiques à ceux faisant l'apologie du terrorisme. Pour cela, il calque son amendement sur le fameux article 4 de la LOPPSI.
« Lorsque les nécessités de la lutte contre la diffusion d'images ou de représentations faisant l'apologie des actes de terrorisme prévus par le titre II du livre IV du code pénal le justifient, l'autorité administrative notifie aux personnes mentionnées au 1 du présent I les adresses électroniques des services de communication au public en ligne contrevenant aux dispositions de cet article, auxquelles ces personnes doivent empêcher l'accès sans délai. »
Il laisse le soin à un décret de fixer les modalités pratiques.
Le décret LOPPSI est toujours en préparation
Hasard du calendrier, Manuel Valls a clairement laissé entendre que le décret LOPPSI, qu'on pensait enterré d'après les affirmations de Fleur Pellerin, était toujours en préparation.