Cagnotte volée: les gendarmes sèment l'émoi dans une école
18/05/2010
Après le vol d'une tombola dans une école primaire, les autorités ont menacé les écoliers de relever leurs empreintes digitales. Les parents d'élèves dénoncent des méthodes sans tact.
A l'école communale de St Jean d'Assé (Sarthe), l'édition 2010 de la tombola scolaire ne risque pas de s'effacer sitôt des mémoires des écoliers. Tout commence le vendredi 7 mai au matin, lorsque la directrice de l'école s'aperçoit de la disparition du fruit de la tombola. Immédiatement, elle alerte la gendarmerie locale. Le groupement de la gendarmerie du Mans arrive à l'école dans la foulée et propose au corps enseignant, pour ne pas effrayer les élèves, de fouiller les cartables, les poches et les casiers des vingt-six élèves suspectés. Sans résultat. L'enseignante, qui dépose une plainte pour vol, confie aux enquêteurs la boîte qui contenait le butin pour la faire expertiser par un laboratoire.
«Les professeurs n'ont pas de compétence d'enquête en cas d'infraction, il était donc normal d'appeler les forces de l'ordre», affirme Emmanuel Roy, inspecteur d'académie de la Sarthe. Ce à quoi le SNUIPP (Syndicat National Unitaire des Instituteurs Professeurs des écoles) rétorque que «l'enseignante aurait du discuter avec les parents avant et instaurer le dialogue».
«Chantage»
Les gendarmes, eux, sont revenus le lundi sans préavis pour avertir les enfants que la plainte déposée serait retirée si la somme complète était restituée avant la fin de la semaine. Sans quoi, ils seraient obligés de prendre dès la semaine suivante les empreintes digitales des écoliers, âgés en moyenne de 10 ans. «Ce chantage n'est pas normal ! Soit on a besoin des empreintes pour faire avancer l'enquête et on les relève, soit c'est un geste inutile et alors, on s'en abstient», s'insurge Gilles Moindrot, secrétaire général du SNUIPP.
Alertée par l'émoi de certains élèves, la directrice de l'école adresse une lettre à tous les parents dans le carnet de correspondance et les convie à une réunion d'explication. Parents, gendarmes et enseignants sont rassemblés autour de la table pour dédramatiser. Les gendarmes annoncent alors que l'empreinte exploitable relevée sur la boîte est celle d'un adulte. Les enseignants ont proposé que soient prélevées leurs empreintes, ce qui a été fait, mais celles-ci ne correspondent pas à celle relevée sur la boîte.
«Des enfants pleuraient»
Les enfants n'auront donc pas à faire relever leurs empreintes mais le traumatisme est bien présent chez certains. Jean-Michel Bourdin, dont le fils se trouve dans la classe de CM2 suspecte, sonne l'alerte : «Des enfants pleuraient pendant la 'palpation'», Bruno, un autre parent d'élève en colère, a évoqué les cauchemars nocturnes de certains camarades de son fils. «Dans un lieu d'éduction, on vient signifier aux enfants qu'ils sont coupables. Ce n'est pas de la pédagogie, c'est de la répression. On a oublié le ton de l'enfance», regrette-t-il.
Néanmoins, l'académie dit avoir «essayé de travailler en bonne intelligence pour perturber le moins possible les enfants. Le terme ‘palpation' est celui utilisé par les forces de l'ordre or on a demandé aux enfants de vider leurs poches, voilà tout. Notre erreur a peut-être été de reprendre ce terme dans la lettre aux parents», tempère Emmanuel Roy. L'empreinte sur la boîte va maintenant être envoyée au fichier national dans l'espoir de résoudre l'énigme.