Le Parlement européen a voté ce mercredi contre le traité anti-contrefaçon, enterrant définitivement ce texte jugé potentiellement liberticide par ses détracteurs.
29.02.2012
L'Acta, un traité anti-contrefaçon flou et contesté débattu au parlement européen
Cette semaine, le parlement européen débat de l'ACTA, le traité de lutte contre la contrefaçon des marchandises et des fichiers numériques. Des milliers de personnes ont défilé en Europe ce week-end s'insurgeant contre un texte jugé liberticide. L'Union européenne, mais aussi les détenteurs de droits assurent le contraire. Des différences d'interprétations qui s'expliquent par l'imprécision du texte.
Des milliers manifestants ont de nouveau défilé en Europe le week-end dernier pour protester contre l'ACTA, le traité de luttre contre la contrefaçon de marchandises et de fichiers numériques, qui est débattu cette semaine au parlement européen. Lundi soir, l'association de défense du citoyen internationale Avaaz.org a annoncé avoir fait signer 2,5 millions de personnes contre le traité. Ce mouvement de protestation est inédit à l'égard d'un traité plutôt obscur pour le commun des mortels.
Un texte dangereux parce que flou
Deux thèses s'affrontent sur l'interprétation d'un texte, qualifié de liberticide pour les uns et de non événement pour les autres. A bâbord, les opposants à ACTA, issus de la société civile, représentés par des associations de défense de la liberté sur Internet, comme la Quadrature du Net, ou l'April, qui défend le logiciel libre. A tribord, les ayants droit, notamment les marques, à l'image de l'Unifab, qui préfèrent porter la bonne parole directement auprès des parlementaires. Autre défenseur discret : le ministère des affaires étrangères, qui a assuré en réponse à une question écrite par le député UMP Lionel Tardy à l'Assemblée nationale, qu'Acta renforce "le droit au respect de la vie privée". Une position qui n'est visiblement pas clairement assumée, personne de la majorité ne s'exprimant clairement sur le sujet.
Pourquoi un tel hiatus entre les différentes lectures ? « Le texte a évolué au gré des négociations et parce que la société civile s'est révoltée. D'une version ouvertement répressive, le texte final est devenu vague. C'est pire que tout, car cela ouvre la voie à des interprétations diverses », indique Jérémie Zimmerman, de la Quadrature du Net. De fait, l'objet principal du texte est toujours d'étendre les « mesures existantes sur les contrefaçons de marchandises et leur circulation, comme les dommages punitifs, l'obtention d'informations, à d'autres pays que ceux de l'Union européenne ou les Etats-Unis. Mais après, le diable se cache dans les détails », indique Cédric Manara, professeur de droit à l'Edhec.
Les FAI et éditeurs de logiciels dans le viseur
Pour les tenants d'Acta, le traité ne modifie pas les règles en cours. Ainsi, tentant de tordre le coup à quelques « idées reçues », l'Union européenne, qui a négocié le traité, assure qu'Acta ne limitera pas l'accès Internet et ne censurera pas les sites. Une lecture que ne partagent pas les détracteurs du texte. Principal problème : le texte vise, sans préciser, tous les acteurs qui seraient « directement ou indirectement » responsables de contrefaçon. Autrement dit, « cela pourrait impliquer pénalement les FAI, mais aussi les éditeurs de logiciels et toute sorte d'intermédiaire technique », indique Jeanne Tadeusz, responsable des affaires publiques de l'APRIL. Un danger qui finirait par inciter les éditeurs, peu désireux de se retrouver devant le tribunal, à brider l'innovation.
Les méthodes de filtrage utilisées contre Wikileaks ou Megaupload
Les négociateurs du texte le jurent : il ne s'agit pas d'obliger les fournisseurs d'accès Internet à filtrer les contenus a priori. Mais certains, en doute, à l'image de Jérémie Zimmerman : « le texte dit qu'il faut 'prévenir toute atteinte' à la contrefaçon. Cela pourrait signifier d'agir avant et de mettre en place des mesures de filtrage efficace et rapides ». Et Cédric Manara de surenchérir : « il n'est pas à exclure une duplication des méthodes observées contre Wikileaks ou Megaupload. On peut imaginer le dé-référencement immédiat par contrainte sur les moteurs de recherche ».
Préserver les verrous mis en place par les producteurs de films ou de musique
La aussi, sur le papier, l'Acta, n'a pas pour objectif d'empêcher le partage de fichiers dans un cadre privé, mais seulement de mieux lutter contre le piratage commercial. Pourtant, le traité prévoit de lutter drastiquement contre « les mesures techniques » - les logiciels par exemple - qui font sauter les verrous numériques installés par les producteurs sur les films ou les musiques. « Cela revient à dire que si un DRM empêche qu'un blu-ray soit lu avec un lecteur, il n'y a pas d'autre solution que changer de lecteur"», indique Jeanne Tadeusz.
Les médicaments génériques également concernés
Mais le danger finalement plus grave est à chercher du côté des médicaments génériques, utilisés et commercialisés par des pays en voie de développement. Même si un chapitre concernant les brevets en tant que tel a été supprimé, par rapport aux textes initiaux, les conséquences du renforcement du droit des marques continue d'inquiéter Médecins sans frontières. « MSF a toujours été concerné par la prolifération des mesures pénalisant l'accès à la médecine. Et ACTA contribue à ce phénomène. [Le texte] brouille la distinction entre les différents droits de propriété intellectuelle, et ouvre la voie à des sanctions excessives, en augmentant les possibilités d'actions légales contre les fournisseurs légitimes de génériques», indique MSF dans un communiqué.
Un danger d'autant plus grand qu'Acta grave dans le marbre la possibilité pour les douanes d'intercepter aux frontières des convois, même dans les zones de transit. Ce qui reviendrait à autoriser les pays signataires à intercepter des chargements de médicaments voyageant entre l'Inde et l'Afrique. Pourtant, la renégociation actuelle des règles douanières prévoit exactement le contraire, d'ailleurs au grand dam des ayants droits
L'alourdissement des sanctions pénales
C'est le point central du texte sur lequel s'accordent pro et anti-Acta : les sanctions financières seront alourdies quoiqu'il arrive, car calculées « à l'échelle commerciale ». Floue, l'expression ouvre la voie à toutes les unités de mesure et peut toucher tous les acteurs de la chaînes. « Si l'on crée un blog avec Blogger (Google), qui incluent des vidéos contrefaisantes et des pubs AdSense [le système publicitaire de Google], Google en profite-t-il ? La réponse est incertaine... et il y a pourtant des sanctions pénales à la clef », s'interroge Cédric Manara de l'Edhec. Plus grave, combien devrait payer un vendeur ou un acheteur de médicaments génériques (de trithérapie), jugé coupable de contrefaçon ?
Un vote dans l'attente de la Cour européenne de justice
Pour connaître la réponse à ces questions, encore faut-il que le traité aille à son terme. Il devait être voté au parlement européen en juin, mais devant le mouvement de colère qui s'est manifesté depuis un peu partout, l'Union européenne a demandé à la Cour européenne de justice de vérifier si le texte respectait le droit européen, retardant le procédé de plusieurs mois. S'il est ratifié, l'Union devra « lui doit donner force juridique interne, et donc prendre une directive », indique Cédric Manara. Charge ensuite aux Etats de le transposer en droit national. Si les termes restent flous, les juges se chargeront de donner l'interprétation des textes au moment des litiges.
Une chose est sûre, l'idée initiale n'est pas venue d'Europe, mais des Etats-Unis et du Japon en 2006. Entamées en 2008, avec le Maroc, l'Australie, la Nouvelle-Zélande Singapour et la Corée, les négociations ont fini par aboutir à un texte final en décembre 2010. 22 des 27 Etats membres de l'Union européenne ont signé l'accord le 26 janvier dernier.
26/04/2010
Le texte de l'ACTA publié officiellement
Le fameux texte de travail de l’ACTA (Anti-Counterfeiting Trade Agreement) a enfin et comme prévu été publié sur le site de la Commission européenne, après une forte pression publique et du parlement européen. Disponible en anglais sous forme d’un PDF, ce texte compte 39 pages.
La Commission européenne heureuse de cette publication
Après plusieurs années de négociations obscures réalisées par l’Union Européenne, les États-Unis, le Canada, le Japon, la Corée du Sud, le Mexique, le Maroc, la Nouvelle-Zélande, Singapour, et la Suisse, un début de transparence arrive enfin.
Le document publié porte sur les dernières négociations en date, à savoir le 8e round, ayant eu lieu à Wellington entre le 12 et 16 avril 2010. « La Commission européenne salue la décision de rendre le projet disponible au public » a ainsi commenté l’Europe.
Le champ large de cet accord, et face à l’opacité des négociations, de nombreux médias, personnalités et associations craignaient une remise en cause de certaines libertés dans le monde, afin de protéger plus encore le droit d’auteur.
L'ACTA n'est pas dangereux selon la Commission
Pourla Commission Européenne, il semble n’en être rien : « Le texte indique clairement que l'ACTA est vraiment à propos : il donnera à notre industrie et à nos créateurs une meilleure protection sur les marchés étrangers, ce qui est essentiel pour que nos entreprises prospèrent » a décrit Karel De Gucht, le commissaire européen désigné pour le commerce.
L’ACTA « n'aura aucun impact négatif sur les citoyens européens » promet-t-il, avant de rajouter que l’ACTA « sera pleinement en conformité avec la législation de l’union européenne actuelle. Cela signifie qu'elle est limitée à l'application des droits de propriété intellectuelle. »
Une victoire pour la démocratie
Un avis qui n’est pas forcément celui de tout le monde. Pour la Quadrature du Net notamment : « Citoyens, ONGs et parlements du monde entier doivent poursuivre leur action commune pour dénoncer l'ACTA et ses dangers. Ce processus de blanchiment législatif est incompatible avec la démocratie et les objectifs de protection des libertés fondamentales, d'Internet, de la santé publique et de l'innovation.
Après plus de deux ans d'opaque élaboration, les négociateurs de l'ACTA ont fini par céder sous la pression des ONG et des citoyens de par le monde. Le Parlement européen, ainsi que plusieurs institutions et groupes d'entreprises se sont opposés au processus de négociation ainsi qu'aux conséquences potentiellement désastreuses de cet accord multilatéral impossible à amender.
La publication du texte ne rend pas pour autant légitime le contenu de l'ACTA, et la transparence ne justifie ni le blanchiment législatif, ni le contournement du processus démocratique. »
Une remise en cause de la liberté d'expression ?
Pour Jérémie Zimmermann, l’un des fondateurs de la Quadrature, la publication du texte est déjà une victoire pour la démocratie. Quant au texte en lui-même, il n’est pas exempt de tout reproches : « La publication de ce texte montre qu'une mobilisation massive de citoyens de par le monde peut porter ses fruits. Toutes les fuites ont jusqu'à présent montré que l'ACTA pourrait remettre gravement en cause la liberté d'expression, l'accès aux médicaments et l'innovation dans la société de la connaissance. Cette publication officielle semble indiquer que c'est toujours le cas. Nous devons continuer à refuser à tout prix que des négociateurs non-élus mettent seuls en place des politiques aux conséquences graves sur ces aspects fondamentaux de nos sociétés. »
19/03/2010
L'actualité informatique et multimédia
Le silence de la France ravive les inquiétudes autour d'ACTA Bien mal acquis ne profite jamais
Hier, quatre organisations, Act Up-Paris, l’April, OXFAM, et la Quadrature du Net ont rencontré Patrice Guyot et Jean-Philippe Muller de la DGTPE (direction générale du trésor et de la politique économique) ainsi qu'un représentant des douanes. Thème du jour : l'accord ACTA (anti-counterfeiting trade agreement), ce fameux document négocié depuis 2008 dans la plus grande opacité et loin des plateformes démocratiques.
Nous avons pu contacter hier soir Jérémie Zimmermann, porte-parole de La Quadrature du Net et Alix Cazenave, de l’April pour obtenir leur avis après cette rencontre. Sentiment commun : le gouvernement français a été incapable d’apporter les garanties minimales destinées à désamorcer les risques d’ACTA. La DGTPE a préféré promettre que le texte négocié ne dépassera pas le cadre de "l'acquis communautaire", ce qui contredit de nombreuses analyses des documents fuités et dans le même temps, remettrait en cause la nécessité même de négocier cet accord.
Dénonçant « une vision unilatérale, orientée copyright et brevet » Alix Cazenave a constaté que de bonnes intentions, mais des paroles suivies d’aucune garantie : « personne ne veut empêcher l’accès aux médicaments, porter atteinte au logiciel libre, mais dans les faits sont incapables d’apporter les garanties de nature à nous rassurer. » Et Jeremie Zimmermann de souligner « C’est pour cela qu’on a demandé les lignes de négociations infranchissables sur lesquelles la France allait se baser sur les discussions. »
Red lines et questions dans le noir
Quelques questions posées hier pour définir justement la position française…
La France compte-t-elle cautionner un accord qui fera peser une responsabilité accrue sur les intermédiaires techniques de l'Internet pour la transmission et le stockage d'oeuvres par leurs utilisateurs ?
La France acceptera-t-elle un accord qui entravera la recherche, bloquera la production ou la circulation des génériques et renforcera le pouvoir accordé aux douanes, autorisant la saisie de médicaments à destination des pays en développement dans le pays où ils sont en transit et brevetés ?
La France compte-t-elle accepter de généraliser, en durcissant leur protection juridique, les DRM, ces menottes numériques entravant la concurrence, l'interopérabilité et le développement du logiciel libre, alors que l'on attend toujours l'étude d'impact de la loi DADVSI ?
…Questions restées sans réponse précise. Ou plutôt : la DGTPE s’est enfermée dans cette notion d’acquis communautaire. « Ce qui est inquiétant est qu’ils se cachent derrière les procédures de négociations et les maigres garanties de ne pas dépasser l’acquis communautaire alors que celui-ci est soumis à interprétation. Nous, on a la certitude qu’il y a un arsenal qui veut mettre le net sous la coupe des industries du divertissement. On a demandé des lignes que ne franchira pas la France sur ce dossier. On attend des réponses précises et les lignes que ne franchira pas la France sur ce dossier, afin de garantir la préservation des libertés individuelles. » renchérit Jeremie Zimmermann (voir le communiqué de presse).
ACTA et acquis communautaire
Acquis communautaire ? Le champ de négociation d’ACTA est ce fameux acquis, sauf que ce dernier sent franchement la poussière si ce n’est pire : le traité OMPI de 1996, une commande des lobbies de la culture et du logiciel prioritaire, avait conduit à l’adoption de la loi DMCA aux États-Unis et de la directive EUCD en Europe.
Cette dernière avait ensuite enfanté dans la douleur la loi DADVSI, loi qui sacralise la protection juridique des verrous numériques. « Ce qu’on veut consolider aujourd’hui c’est un texte écrit par les lobbies », résume-t-on d’un trait. Le plus piquant est que le rapport d’application de la DADVSI, une promesse électorale de Nicolas Sarkozy, est toujours attendu. Sur le terrain des DRM, là encore, ACTA agit donc sans aucune étude d’impact.
Transparence ?
Le sujet de la diffusion des documents ACTA a évidemment été abordé hier. « La publication des documents serait en cours de négociation » indique l’April, « mais c’est juste un préalable au débat démocratique qu’il doit y avoir autour des sujets pointus. » Une certitude : cette publication donnera l’importance de la prise en compte de l’intérêt général dans ces travaux.
Hadopi et ayant droit.. et ACTA
Des représentants du ministère de la Culture devaient être là, tout comme des ayants droit (le nom de Frédéric Goldmisth de l'Association des Producteurs de Cinéma ) . Ils ne sont finalement pas venus à cette rencontre.
Autre surprise, le nom de Marie François Marais fut cité hier par les représentants de DGTPE comme faisant partie des magistrats experts de la France sur le volet sanction d’ACTA (un sujet entrant dans le ressort des États membres).
Cette magistrate de la Cour de cassation est effectivement une « experte » : actuellement présidente de la HADOPI, elle fut également en charge de l’arrêt Mulholland Drive de la haute juridiction, qui interdit depuis la copie privée en matière de DVD. Ou de l'arrêt Tiscali, qui a estimé qu'un FAI qui héberge des données sur une partie de son site, tout en y affichant de la publicité automatiquement, doit être reconnu comme éditeur et responsable du contenu.r
MONDETRON !!!
A N T I F A
Le poète Armand Robin (1912-1961)
définit "l'anarchiste" comme celui qui est "purifié volontairement, par une révolution intérieure, de toute pensée et de tout comportement pouvant d'une façon quelconque impliquer domination sur d'autres consciences
Celui qui défile joyeusement au pas cadencé a déjà gagné mon mépris. C'est par erreur
qu'on lui a donné un cerveau puisqu'une moelle épiniére lui suffirait amplement.
Einstein.
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